Notice de Sœur Catherine Hitti

(1924 - 2001)

Marie Hitti naît à Beyrouth le 15 mai 1924. Très jeune, elle perd ses parents. C'est à l'Orphelinat St Charles qu'elle est confiée.

Ses classes terminées, elle travaille à la "pharmacie" de la maison avec soeur Dabasence à laquelle elle confie son désir d'être Fille de la Charité. Mais la santé de Marie laisse beaucoup à désirer et soeur Dabasence n'ose l'encourager. Tiendra-t-elle dans une vie de Fille de la Charité? Elle en parle au docteur qui sans hésiter rédige un certificat attestant que Marie peut suivre la vocation qui est manifestement la sienne.

Après son postulat commence à Damas puis continue à la Maison Provinciale, elle entre au Séminaire de Beyrouth le 2 décembre 1946. Elle s'y montre intelligente, dévouée, cordiale et travaille à pratiquer. la vertu. En somme, capable de devenir une bonne Fille de la Charité. Le point noir reste la santé.

A sa sortie du Séminaire, elle est placée à l'orphelinat St Charles. On lui confie les petites classes. Très gaie, elle est très vite aimée des enfants a qui elle se donne de tout cœur. Elle travaille aussi à l'ouvroir car elle très experte en couture et broderie. Son grand plaisir est le chant: elle a une très belle voix et fait partie de la chorale. Tout au long de sa vie, Sr Catherine chantera. Elle chantera à la chapelle entraînant ses compagnes à louer le Seigneur. Elle chantera à la Chambre de Communauté; y créant un climat de détente et de joie. Toute occasion lui sera bonne pour s'exprimer en musique.

Les années passent. Le 8 décembre 1951, elle prononce ses premiers vœux. Trois ans plus tard, elle reçoit son premier changement. C'est à la Miséricorde d'Alexandrie qu'elle est envoyée. Soeur Deguet l'y reçoit et lui confie des classes où elle enseigne le français et le catéchisme. La Sr Servante note sa bonne éducation, son jugement droit, sa bonté mais aussi son caractère parfois capricieux et versatile. Sr Catherine, de son côté, apprécie l'atmosphère de la maison qu'anime soeur Deguet. Celle-ci, bonne musicienne, veille à l'exécution des chants liturgiques et, connaissant Sr Catherine, l'on peut assurer qu'elle n'arrivait pas la dernière aux répétitions. Le temps de la recréation est aussi un temps privilégié. soeur Deguet y apporte tout son entrain auquel Sr Catherine s'associe avec joie.

En 1966, elle ajoute à son office d'enseignante, la responsabilité de la Jeunesse Eucharistique. La santé tient bon mais elle reste à ménager.

En 1968, soeur Deguet quitte Alexandrie pour le Caire. La nouvelle Sœur Servante apprécie rapidement la serviabilité de Sr Catherine, son dévouement, son courage au travail mais note aussi les points faibles de notre sœur : une certaine dose d'originalité et un caractère un peu capricieux. Et vient le jugement final : "Elle réussit tout mais manque de persévérance." Le portrait est assez ressemblant.

En 1970, soeur Catherine obtient le diplôme pédagogique du Centre Culturel Français. Elle enseigne en classe de 6ème et le fait avec conscience.

En 1975, nous la retrouvons au Caire, à la maison d'Helmieh. C'est son dernier changement. Elle ne quittera Helmieh que pour entrer dans son éternité, le 12 décembre 2001.

25 années bien remplies: Elle se retrouve enseignante en classe de 6°. Son caractère heureux et agréable fait rapidement la conquête de ses compagnes et de ses élèves. Celles-ci n'oublieront pas leur maîtresse et c'est vers elle qu'elles reviendront souvent pour la voir et lui demander conseil.

Tous les témoignages insistent sur deux points: sa gaieté et sa bonté. Ce sont vraiment les dominantes de sa personnalité. Si sur certains points, elle manque de constance, jamais elle ne manque de rayonner cette joie et cette bonté sur tous ceux qui l'entourent. Il lui suffit de peu de chose, un sourire, un regard rieur, un mot de gentillesse adressé, en passant, à l'un ou à l'autre et le courant passe. Femmes de ménage ou anciennes élèves, professeurs, employés ou parents, chrétiens ou musulmans, combien d'entre eux gardent le souvenir d'un joyeux bonjour matinal, d'un mot de compassion ou d'encouragement, d'une aide discrète et efficace. D'une complaisance rare, elle mettait la main à tout et, malgré la fatigue de ses jambes, ne cessait dé travailler et d'aller là où on la réclamait pour rendre service.

Comment ne pas évoquer sa charité délicate envers les pauvres, ses gestes de gentillesse avec ceux et celles qui lui rendaient service. Il lui suffisait de peu pour leur manifester son amitié, sa reconnaissance, son souci de partager leur fatigue: un paquet de thé glissé dans le sac, un fruit, un billet de quelques livres égyptiennes... Ce « peu», donné avec le sourire faisait leur joie, et ceci à l'occasion d'un grand ménage, à l'approche d'une fête, d'un transport de paquets plus ou moins lourds. C'était son merci fait avec tant de gentillesse et de délicatesse qu'ils y reconnaissaient son amitié.

Au long des années, la vie intérieure de Sr Catherine s'était approfondie. Elle fait alors partie d'un groupe de prière qui, reconnaît-elle, lui apporte beaucoup au plan spirituel. Chaque jour elle se lève à 4h½ et sans faire de bruit s'habille et descend vers 5h à la chapelle : moment de solitude qu'elle désire vivre avec le Seigneur. Elle dira volontiers que c'est le meilleur moment de sa journée.

Avec les années, elle se voit déchargée des classes. Son domaine est désormais celui de la Procure et son travail le plus exigeant la photocopie surtout à l'époque des examens. Malgré la fatigue de ses jambes, elle ne manque jamais à l'exactitude que ce soit à son travail, à la vie communautaire, à son office de sacristine. Les aumôniers de la Communauté reconnaissent tous sa ponctualité et sa fidélité exemplaire. A la communauté, elle est très vivante. Partageant facilement ses pensées et ses prières à l'oraison, elle sait aussi détendre l'atmosphère parfois trop sérieuse à la recréation, par des récits amusants qu'elle a appris ou entendus dans sa jeunesse et dont elle se souvient parfaitement, ayant une très bonne mémoire. Un mot banal, entendu dans la conversation lui suffisait aussi pour entonner un des multiples chants de son répertoire très bien fourni en la matière.

A mesure que s'approfondit sa vie intérieure, elle devient encore plus aimable, plus compréhensive avec tous. Une image du Christ l'accompagne partout: elle est dans son missel, dans sa chambre, près de son lit... sûr moyen pour elle de vivre en sa présence. Le nom de. Jésus est souvent sur ses lèvres. Elle lit de nombreux ouvrages de piété et lorsqu'un passage la touche particulièrement elle aime le faire partager à une compagne.

Notons encore sa fidélité dans ses affections et ses amitiés. Ses retours au Liban étaient pour elle l'occasion de revoir non seulement sa famille mais aussi d'anciennes compagnes. C'était pour chacune la joie de se revoir, d'échanger souvenirs et nouvelles. Sr Catherine restait ainsi très vivante dans la mémoire de chacune.

Telle était notre Sœur Catherine. Ecoutons un témoignage:

" A elle, je confiais mes craintes, mes ennuis, mes révoltes. Grâce à sa douceur, j'ai renoncé à mon caractère coléreux; grâce à son indulgence, j'ai appris à pardonner aux autres, à leur faire des excuses. Elle a été pour moi l'exemple du travailleur dévoué et honnête. Chargée de photocopier les feuilles des examens, elle y a travaillé une semaine entière sans demander l'aide de personne, aux dépens même de sa santé. Dans son sourire toujours présent, elle rendait la vie des autres gaie et vivante."

Un autre témoignage souligne avec émotion combien Sr Catherine savait prendre part à la vie des autres : sa joie devant d'heureuses fiançailles, son souci devant les difficultés financières d'une famille, ses inquiétudes devant la grave maladie d'un enfant...

Et nous voici arrivées avec notre Sœur Catherine à la fin de l'an 2001. Sa santé ne l'a pas empêchée d'être une vraie Fille de la Charité, toute donnée à Dieu et aux autres, même si elle est restée à surveiller toute sa vie. Et la voici non loin de ses 80 ans. La marche lui est de plus en plus pénible et lorsqu'il s'agit de se rendre en ville, Sr Catherine ne s'y aventure pas seule. Elle fait appel à une compagne, toujours la même, qui se fait "son bâton de vieillesse; Et voilà nos deux sœurs, toutes deux octogénaires, qui, bras dessus, bras dessous, affrontent les rues populeuses du Caire, au milieu du tintamarre des voitures.

Ce jour-là, Sr Catherine heurte soudain son pied contre une dalle cassée. Elle tombe et tout le poids de son corps pèse sur le bras droit qui se casse près de l'épaule. Malgré la douleur très vive, Sr Catherine trouve la force de dire à sa compagne, en souriant: " Vous voyez, Jésus veut m'apprendre à souffrir."

La souffrance, que va lui occasionner cette fracture, ne l'empêchera pas de travailler. Les jours passent. .. Et puis, un soir, alors que sa Sr Servante et la plupart de ses compagnes assistent à un concert de chants de Noël, Sr Catherine reste à la maison avec deux autres sœurs dont sa fidèle compagne. Après avoir regardé ensemble un film à la télévision, elles gagnent toutes les trois la chambre de Sr Catherine. Soudain celle-ci s'effondre en travers du lit en murmurant: " Ne me laissez pas ... 0 Vierge Marie"

Tout est fini ... soeur Catherine est partie vers Jésus qu'elle a tant aimé et tant prié. Sa soeur Servante et ses compagnes aussitôt alertées arriveront trop tard. Sr Catherine nous a quittées.

Le lendemain, la messe dite dans la chapelle d'Helmieh unissait, dans une même et fervente prière la Communauté, les sœurs du Caire et d'Alexandrie, les professeurs et élèves, anciens et actuels, les employés et femmes de ménage, ces dernières inconsolables. Tous gardaient dans leur cœur le souvenir de la bonté et de la joie de notre sœur."

"Quand une personne sert Dieu par la voie d'amour, tout ce qu'elle fait, ce qu'elle pense et ce qu'elle dit, donne à Dieu un plaisir si grand qu'il n'y a point de père qui prenne plus de plaisir à voir ce que fait son fils que Dieu en prend à voir cette Fille de la Charité. " St Vincent.


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