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Soeur Genevieve Nasser23 juillet 2020Obsèques de Sœur Geneviève Nasser
Maison Provinciale
Beyrouth, le 20 juillet 2020.
Homélie
Mt 12, 38-42.
Des Scribes et des pharisiens, encore une fois, mettent Jésus à l’épreuve. Pourquoi ? Tout simplement parce qu’ils se sentent menacés par lui, menacés non pas pour des raisons de foi, mais de pouvoir. Ces « certains » dont parle le texte que nous venons de proclamer, ce sont souvent nous-mêmes quand nous n’avons pour seul but, même si nous ne voulons pas le reconnaître, que nos intérêts individuels. Nous sommes « ces certains » quand nous regardons l'Eglise comme une réalité purement humaine et non comme un projet d'amour de Dieu.
« Aucun signe ne leur sera donné ». La réponse est claire. Pourquoi cette réponse et ce refus ? Tout simplement pour bien souligner et rappeler que les signes sont la relation de communication et d'amour entre Dieu et l’humanité. Il n’est pas question dans cette relation d’un intérêt ou d’un pouvoir quelconques. Il n’est pas question de marchandage mais de confiance. Le signe, c’est Jésus lui-même, aussi la Parole est-elle une invitation à la conversion des cœurs dans l’humilité, cette humilité qui nous permet de reconnaître nos limites et de reconnaître en Dieu un Père et dans les autres des frères.
Et c’est dans cet esprit que Sœur Geneviève a essayé de mener sa vie, malgré les embûches qui parsèment toujours le chemin d’un être humain, quel qu’il soit.
Née à Beyrouth le 19 mars 1928, Antoinette Nasser est présentée à la Compagnie des Filles de la Charité à Beyrouth par Sœur Ageorges, alors Assistante provinciale. Elle y est accueillie le 19 mars 1949, le jour de son 21ème anniversaire donc. Elle prendra le nom de Geneviève. Son année de Séminaire Interne terminée, elle sera placée à l’école gratuite Sainte Catherine de Damas où elle fera la classe. En 1966, nous la retrouvons dans la communauté de l’Immaculée Conception mais responsable de l’école gratuite de Rmeilleh. Elle en profitera pour reprendre des études classiques et des formations en sciences pédagogiques et administratives. Elle rejoindra par la suite la communauté de la Maison Provinciale mais tout en dirigeant toujours l’école de Rmeilleh.
La guerre du Liban qui éclate en 1975 perturbe la marche des différentes œuvres et l’école de Rmeilleh est pillée et incendiée. La population est jetée sur les routes et cherche à trouver refuge ailleurs. Sœur Geneviève se retrouvera alors enseignante à l’école Notre Dame de Lourdes de Damas en 1981. Elle est à nouveau à la Maison Provinciale en 1986 pour s’occuper des écoles gratuites des Filles de la Charité au Liban sur plan administratif et les représenter auprès de l’Etat libanais. Entretemps la reconstruction de l’école de Rmeilleh est entreprise et Sœur Geneviève en reprendra la direction jusqu’en 2018. Son âge et sa santé ne lui permettant plus de faire la navette tous les jours entre Beyrouth et Rmeilleh, elle passera les deux dernières années de sa vie à la Maison Provinciale et je la rencontrerai souvent soit dans les cuisines soit à l’accueil. Affaiblie et au bout de ses forces, elle a rejoint l’éternité du Père le samedi 18 juillet 2020 dans la matinée.
Les témoignages de plusieurs personnes qui ont rapproché Sœur Geneviève, ont collaboré avec elle ou ont vécu avec elles comme compagnes dans la communauté, sont unanimes pour reconnaître en elle une Fille de la Charité toute donnée à sa mission. Travailleuse rigoureuse dotée d’un bon sens de l’administration, elle sera reconnue pour sa discrétion et sa volonté toujours active d’éviter affrontements ou réactions tonitruantes. Fidèle aux exercices communautaires, elle ne cherchera jamais à briller par des discours pédants ou des manifestations religieuses véhémentes. Elle aura passé sa vie à sa mission, y mettant toute son énergie et tout son savoir-faire.
Il m’a été donné de collaborer avec elle en tant que Directeur, mais aussi en tant que collaborateur de l’œuvre d’Orient. Je la revois encore me demandant conseil pour rédiger une demande d’aide parce que les infiltrations d’eau avaient endommagé certaines salles de classe, parce que la salle des fêtes de l’école était inondée dès les premières pluies ou que les salles d’aisance devenaient insalubres. Son souci premier était le bien-être des élèves et du corps enseignant, aussi se souciait-elle toujours, dès que la fin du mois arrivait et que les fonds manquaient, de trouver le moyen de régler les salaires. Elle s’inquiétait du sort des élèves et des salariés de son école mais savait garder son sang-froid, du moins extérieurement, alors que les soucis la rongeaient intérieurement. Elle finissait par trouver des dons qui arrivaient toujours à point pour résoudre ce problème. Sa confiance dans le Seigneur était grande et savait fort bien que le Seigneur répondrait d’une manière ou d’une autre à ses prières.
La mission de Rmeilleh, Sœur Geneviève, se poursuit et se poursuivra tant qu’elle aura pour but premier d’assister les pauvres. Le Seigneur, comme toujours, trouvera les moyens qui lui sembleront les meilleurs pour que pareille mission se poursuivre tant qu’elle restera fidèle à l’idée première de sa fondation. De là où vous vous trouvez maintenant, demandez au Seigneur d’envoyer ses grâces sur cette mission que vous avez aimée et servie le plus clair de votre vie. Reposez en paix, ma Sœur, et intercédez auprès du Seigneur pour l’envoi de vocations solides dans la Compagnie des Filles de la Charité que vous avez chérie et au sein de laquelle vous avez servi pendant 71 ans.
Antoine-Pierre NAKAD cm
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